Grande Ruine : la voie « (a)normale » à défaut d’arête Sud
Grande Ruine : la voie « (a)normale » à défaut d’arête Sud

Grande Ruine : la voie « (a)normale » à défaut d’arête Sud

10 septembre 2015 / Grande Ruine, pointe Brevoort par la voie normale

Après notre retour en fin de journée de la Tour Carrée de Roche Méane en compagnie d’Aurélien le gardien du refuge Adèle Planchard, nous souhaitions conclure notre virée à la Grande Ruine par l’arête Sud, certainement la plus belle manière de gravir la pointe Brevoort. Hélas, plusieurs embûches ont joué en notre défaveur. Notre forme premièrement puisque la veille nous étions partis de très bonne heure de Paris pour dormir le soir même au refuge après une grimpette de 1500 m de dénivelé ; le lendemain avec cette très jolie ascension de la Tour Carrée qui ne nous aura pas reposée ; la météo qui ne tenait pas si bien que cela ; ajoutons pour finir l’approche de cette arête Sud sur un terrain très dégradé à cause des fortes chaleurs de l’été. Tout ceci combiné à fini par… nous refroidir ! Nous voilà donc au petit matin devant notre bol de thé à nous demander ce que serait cette journée. Journée qui ne s’annonce donc pas si belle que cela, les sommets étant déjà couverts par la brume.

Nous partons néanmoins en direction de l’arête Sud et rejoignons la base du glacier en nous questionnant ouvertement sur la suite des événements : poursuivre jusqu’à l’approche de la voie ce qui suppose de franchir le col des Neiges dans un état déplorable à cause du manque de neige justement, attaquer la voie normale par le glacier supérieur des Agneaux qui n’est plus en condition (Aurélien a déconseillé la veille au téléphone à des alpinistes de venir), se lancer dans l’ascension de la Tour Choisy depuis laquelle il est aisé de redescendre en rappel (ce qui n’est pas le cas de l’arête Sud) au cas où la météo vienne à se dégrader ou par manque d’énergie, voire même rebrousser chemin et plier bagage. Olivier et moi-même n’étant pas en « super » forme, nous avons tout de même conclu qu’il fallait tenter l’ascension de la voie (a)normale. Nous voilà donc partis à remonter les pentes de l’imposant glacier zébré de profondes et larges crevasses si bien que nous devions zigzaguer entre celles-ci.

DSCN4677Certaines devaient mesurer la hauteur d’un immeuble de plusieurs étages. Arrivés à la base de la seconde partie du glacier, nous avons été accueillis par des chutes de pierre de toute taille provenant d’un goulet tout à côté de la rimaye que nous devions franchir pour accéder à la pente finale en rochers délités. Les pierres ont fini dans diverses crevasses mais cela n’augurait rien de bon pour la suite. J’ai bien crû que j’allais en rester là. Olivier m’a donné le choix. Il est vrai que le sommet était à portée de piolet et il eut été dommage de faire demi-tour. Nous avons donc rejoint une ancienne trace longeant la rimaye que nous avons franchie sans dommage pour ensuite accéder à une partie pentue en glace. Avec d’infinies précautions, en assurant bien chacune de nos prises, nous avons rejoint les caillasses en longeant le fameux goulet d’où étaient parties les pierres tout à l’heure.

Des blocs enchevêtrés semblaient prêts à se détacher mais d’où nous étions, impossible qu’ils nous atteignent. Nous avons ensuite posé nos sacs pour voguer, légers, vers le sommet. La première partie se déroule en remontant une cheminée resserrée puis se poursuit dans un dédale de blocs tenant les uns sur les autres on ne sait trop comment. Voilà pourquoi cette montagne se nomme la Grande Ruine !

Le sommet est un belvédère majestueux offrant une vue incomparable sur quelques sommets majeurs des Ecrins. Gaston Rébuffat qualifiait d’ailleurs la Grande Ruine de plus beau panorama des Ecrins. Il avait une fois de plus raison. La Meije à notre droite, la Barre des Ecrins à notre gauche, le Pelvoux, l’Ailefroide… nous étions ravis d’être là et sommes restés un petit moment à contempler un panorama minéral et glaciaire exceptionnel tout en grignotant des barres.

Puis ce fut la descente, aisée jusqu’à nos sacs, attentive ensuite, où j’ai posé pour la première fois deux broches à glace tant le retour vers la rimaye était scabreuse. L’assurance sur broche est très efficace à condition de respecter quelques simples règles. Toujours est-il qu’assuré de la sorte, Olivier ne risquait pas grand-chose ! Nous avons ensuite effectué l’itinéraire de montée en sens inverse jusqu’au refuge où nous avons englouti une bonne omelette avant d’envisager le retour sur Paris le lendemain avec un jour d’avance sur notre planning initial.

Quitter cet univers minéral pour, petit à petit, se retrouver dans la vallée de la Romanche fut un enchantement, de même que le déjeuner à la Grave, face à l’imposante face Nord de la Meije. Nous avons déjà planifié de revenir l’an prochain pour réaliser ce qui sera l’un de nos prochains gros projets : la traversée de cette imposante et exceptionnelle montagne.

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