Le Caroux, évidemment
Le Caroux, évidemment

Le Caroux, évidemment

18, 19, 20 avril 2016 / Tête de Braque, Rocher Marre, Arête des Charbonniers, Aiguille Viallat, Grande Paroi d’Arles

Moins 3° à 6 h du matin ce 19 avril dans notre tente sans même être à haute altitude mais plus simplement dans le Caroux, haut lieu du Parc Naturel du Haut Languedoc, à environ 1 heure de route de Béziers. Nous avions mis le réveil relativement tôt de manière à pouvoir enchaîner l’arête des Charbonniers, l’aiguille Viallat et l’aiguille Déplasse. Mais impossible de sortir de la couette ! Nous avons finalement attendu le lever du soleil pour une journée mémorable qui nous fera tout de même faire l’impasse sur la Déplasse. Pas grave, nous reviendrons.

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Moi qui ne connaissais pas ce petit coin de paradis digne du maquis Corse, j’ai été servi. A commencer par les approches de certaines voies, où l’on a vite fait de se perdre si l’on est novice. Mais… j’avais un guide perso en la personne d’Olivier qui connait bien l’endroit pour y avoir crapahuté et grimpé à de nombreuses reprises. L’approche de l’arête des Charbonniers par exemple demande un certain sens de l’orientation et de pratique de ce type de terrain. Nos 3 journées ont été crescendo. Nous avons attaqué lundi par deux très belles voies, aériennes et ludiques, la Tête de Braque et Rocher Marre, toutes deux équipées et recelant de somptueux passages sur des parois « gazeuses » au beau rocher granitique abrasif.

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L’un des intérêts de Rocher Marre consiste en son passage côté 5, la quatrième longueur, où l’on grimpe sur une dalle lisse inclinée sous un surplomb pour ensuite se rétablir sur une seconde dalle verticale en l’enjambant. Tout ceci sous les yeux des randonneurs des gorges d’Heric ! Ce passage rappelle, dit-on, celui du Cheval Rouge de la Meije. Cela tombe bien puisque la traversée de la Meije sera, on l’espère, le plat de résistance de nos projets 2016. Nous avions le matin débuté par la Tête de Braque, chouette belvédère conquis en 6 belles longueurs, avant de glander un peu sur la tête du chien caractéristique.

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Ces deux grimpes courtes parfaites pour faire la connaissance du cailloux du Caroux constituèrent un hors d’œuvre idéal. La seconde journée fut la plus longue. Partis vers 8 heures sous le soleil, nous retournâmes à la tente vers 22 h après avoir redescendu l’intégralité des gorges à la frontale. Quelle merveilleuse journée ! Le début de l’arête des Charbonniers ne se laisse pas apprivoiser si facilement. Elle débute par un dièdre incliné relativement lisse, idéal pour se mettre en condition !

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Ses 7 longueurs sont caractéristiques de l’escalade dans le coin : des relais sur arbre, des fissures, dièdres, fil d’arêtes et autres dalles cohabitent avec le profond ravin des Charbonniers et les gorges en contrebas, où les randonneurs s’affichent sous forme de fourmis. Bref, de quoi mettre en joie tout grimpeur progressant parfois à corde tendue, parfois en posant des relais. La végétation nous a accompagné durant presque toute l’intégralité de l’arête, jusqu’à la « salle à manger », ces endroits plus ou moins tranquille en montagne permettant de souffler et se ravitailler avant de repartir pour de nouvelles aventures.

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La Viallat est un must. Son arête Sud-Ouest comporte 8 longueurs variées composées de gendarmes, cheminées, fissures et dalles surplombantes dans un décor de rêve où il vaut mieux ne pas avoir le vertige. Elle est dotée d’une antécime précédant le sommet d’où la vue sur l’aiguille Déplasse est imprenable.Elle comprend deux longueurs clé, la taillante et le bec d’oiseau. Ce dernier est formé d’un ressaut surplombant (autrement dit on a le cul dans le vide !) qui implique un pas athlétique pour se rétablir sur le fil de l’arête. Je reviendrai à la Viallat rien que pour ces deux passages.

Arrivés au sommet, nous avons soufflé un peu en jetant un œil à un alpiniste qui remontait l’arête Déplasse en solo intégral, sans même être assuré par un second. Après deux rappels, ce fut la descente, délicate parfois avec quelques désescalades par endroits sécurisées par câble, jusqu’au torrent, que j’ai franchi en m’affalant à moitié dans l’eau ! Nous avons enchaîné par la remontée du maquis jusqu’au plateau à 1000 m d’altitude. Nous y avons aperçu des mouflons.

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C’est en prenant pied sur le plateau qu’on se rend compte de la brutale cassure du relief qui, après des centaines de kilomètres, se dérobe pour terminer sa course dans la mer. Ce plateau est une pure merveille pour tout randonneur ! Aride, vallonné, il est d’une beauté à couper le souffle, excepté ces éoliennes au loin, moches certes mais générant de l’électricité sans rejet carbone. Nous avons ensuite rejoint le GR 7 qui nous a conduits jusqu’au petit hameau d’Heric, en haut des gorges. C’est ici qu’on a fait connaissance de la gardienne des lieux, aimable cerbère d’un certain âge après qu’on lui a fait savoir que nous n’étions pas des voleurs ! Elle tient buvette et chambrée pour 4 et est en guerre ouverte contre son voisin pestiféré à ses yeux du fait d’avoir vendu son âme au diable aux sociétés de tourisme proposant portage de bagages et randos confortables.

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Bref, un Clochemerle sur quelques centaines de mètres carrés, sorte de Huis Clos sartrien que nous avons quitté après avoir profité de ses sandwiches et d’un excellent verre de vin local ! Notre expédition s’est terminée par la descente des gorges à la frontale au milieu d’une faune bien réveillée, mouflons, crapauds et fouines.

Le dernier jour fut bien différent des deux premiers. La grande paroi d’Arles mérite bien son nom. Elle ne se laisse pas approcher facilement puisqu’on l’atteint depuis le haut du plateau et en descendant à sa base après avoir longé une monstrueuse carrière où l’homme s’ingénie à détruire la nature pour faire de l’argent en vendant des rochers broyés.

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A ses pieds, la paroi s’apparente à une cathédrale de pierre dissimulée dans un vallon sauvage où il ne passe personne. On s’est fait tout petit devant ce chef-d’œuvre que nous allions remonter en 3 superbes longueurs nommées la « voie classique du mur ». 3 longueurs fort différentes allant crescendo dans la beauté et la difficulté mais sécurisées aux points clés grâce au travail du guide de haute montagne Jean-Louis Raynal, disparu non loin de là en 2007 en équipant une voie d’escalade (http://bit.ly/1TaF8yr). La première longueur est la plus aisée. Elle consiste à grimper en ascendance et au plus facile jusqu’à une terrasse où l’on effectue un relais sur un arbre. De là, le vide est déjà impressionnant.

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La suite est plus belle encore, composée de deux magnifiques dièdres verticaux pour venir se rétablir sur une petite vire. La dernière longueur est la plus « extrême » ! Je ne me serais jamais lancé en premier et Olivier a dû prendre sur lui pour passer les difficultés composées d’un surplomb puis d’un dièdre aérien où le vide est omniprésent. Heureusement que les passages les plus délicats avaient été équipés et que les rares mais bonnes prises de main étaient au rendez-vous. Ce bouquet final a clôturé notre excursion au Caroux de fort jolie manière et l’on s’est dit qu’on y reviendrait bien un jour pour gravir ce qu’on n’a pas eu le temps de faire : l’aiguille Déplasse et le pilier du Bosc. A bientôt Caroux !

Notre vidéo du sommet de l’aiguille Viallat : http://bit.ly/1qPmXHy

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