7 et 8 octobre 2010 / Mont Tondu
Me voilà au pied du mur si j’ose dire ! Après ma rencontre avec Olivier (http://www.youtube.com/watch?v=2rBssuG5J6g) à mon club d’escalade (http://www.leslezards.fr/), sa passion communicative pour la montagne, mon envie irrépressible d’aller voir « la-haut » ce qu’il s’y passe, nous voilà à discuter de notre première sortie en haute montagne. Olivier me propose le Mont Tondu (http://www.camptocamp.org/summits/37808/fr/mont-tondu) dont je n’ai évidemment jamais entendu parler. L’on se penche sur les cartes, sur les topos, sur Google Eath mais tout cela demeure fort abstrait pour moi. Olivier lui, a déjà tout en tête : une belle course, pas trop difficile, pas trop exigeante, en forme de boucle, histoire de ne pas repasser par le même chemin qu’à l’aller, mais au contraire par les lacs Jovet, ce qui représente à la fois une jolie escapade et une initiation idéale à l’alpinisme. Evidemment, je n’ai pas non plus d’équipement si bien qu’Olivier m’habille des pieds à la tête : chaussures de haute montagne, crampons, guêtres, sac à dos, piolet, casque, etc. Un équipement que je mettrai un point d’honneur à posséder personnellement par la suite ! Nous voilà donc partis en train de bon matin pour arriver en fin de matinée à la petite gare du Fayet, suite à quoi nous attrapons le car qui nous transporte tout au bout de la charmante vallée des Contamines. Nous causons avec une mamie qui nous demande ce que nous allons entreprendre, ce qui lui rappelle du reste de bons souvenirs.
Le car nous dépose au haut de la vallée des Contamines. Il fait un temps resplendissant, le petit chemin n’est pas bien loin et les panneaux nous annoncent la direction à suivre. Nous entamons donc la longue montée vers le refuge de Tré-la-Tête à travers une nature encore verte malgré la date déjà bien avancée de l’année. La grimpe est rude mais agréable. Nous finissons par arriver à hauteur du refuge, observatoire idéal sur la vallée en contrebas et également sur la majestueuse ligne de crête du Mont-Joux et du Mont-Joly derrière lesquelles se cache Megève. Des alpinistes espagnols y font une halte avant de redescendre après une course réussie. Cet environnement, celui de la moyenne montagne, je le connais bien mais devine aussi qu’un peu plus haut, le paysage va se métamorphoser, se minéraliser, à l’approche du glacier.
Si nous voulons arriver avant la nuit au refuge des Conscrits, il faut nous dépêcher. Nous prenons donc congé de ce merveilleux endroit et entamons peu de temps après la montée vers le glacier de Tré la Tête que nous atteignons rapidement. Le relief est heurté, il y a de gros éboulis un peu partout et il faut faire attention car la moraine (Amas de blocs et de débris rocheux entraînés par le mouvement de glissement d’un glacier (moraines mouvantes), et apparaissant lors de son retrait ou s’accumulant sur les bords, le centre ou l’extrémité inférieure de celui-ci (moraines déposées). Moraine frontale, latérale, médiane, terminale. Au loin, des traînées longitudinales de pierre et de blocs erratiques, repoussés par le glissement des glaciers, formaient d’immenses lignes de moraines (Verne, Enf. cap. Grant, t.1, 1868, p.110) ne laisse pas forcément présager au non initié que je suis, que le glacier est bien là sous nos pieds et que… ça glisse ! D’ailleurs, ce chemin que nous entreprenons en 2010 ne sera bientôt plus guère usité puisqu’une passerelle (https://www.youtube.com/watch?v=SQ4_DEo7dZg) permettra d’éviter une suite d’échelles dangereuses mises en place à cause du recul du glacier. Passerelle qui fera aussi gagner un temps précieux. Toujours est-il qu’en 2010, nous sommes obligés de remonter le glacier à travers des éboulis. Ma première fois sur un glacier aux crevasses bien marquées. Je suis à la fois pas très rassuré à cause des crevasses que nous longeons et également impressionné par cet environnement, véritable congélateur vivant qui nous aère au fur et à mesure de la montée. Montée qui se terminera au crépuscule, le passage vers le refuge des Conscrits n’étant pas bien marqué. Cette première approche qu’on peut qualifier de « pourrie » dans le jargon, me fera comprendre la chose suivante : la lecture de l’itinéraire est primordiale et les fameux cairns (Pyramide élevée par les alpinistes et les explorateurs comme point de repère ou pour marquer leur passage : Depuis déjà pas mal de temps, les hommes construisent un cairn avec de grosses pierres, sur le sommet de la colline; … J.-B. Charcot, Expédition antarctique fr., 1903-05, Le Français au Pôle Sud, 1906, p. 267.) s’avèrentde véritables lignes de vie pour éviter de se perdre. Hélas, ce jour là nous ne vîmes point de cairns !
A cette époque de l’année, la plupart des refuges sont fermés mais les gardiens laissent néanmoins une salle ouverte, comprenant généralement une table, quelques lits et couvertures, afin que les alpinistes puissent coucher au chaud. Nous ne serons que deux cette nuit là. Olivier prépare le dîner, des pâtes à la sauce tomate, festin censé nous caler et nous apporter suffisamment d’énergie pour parvenir en haut du Mont Tondu le lendemain. Mont que nous apercevons fort bien depuis ce second promontoire, et qui me fait déjà penser à ce que nous allons devoir entreprendre : une redescente sur le glacier puis une grande traversée de celui-ci et enfin une remontée sur le versant opposé, à l’assaut des pentes de neige. Le coucher de soleil est magnifique mais l’endroit me semble appartenir à une autre planète. Une dernière photo et hop à table et au lit !
Lever vers les 6 heures, ce qui reste acceptable pour une course en haute montagne, petit déj avalé et nous voilà partis aux premières lueurs de l’aube. Nous traversons sans encombres le glacier et arrivons assez vite au pied de la pente de neige qui doit nous mener en haut du Mont Tondu. Nous nous équipons, crampons, piolet et encordement puis nous voilà partis. Très vite la pente s’accentue mais sans jamais devenir trop pentue (30°) si bien que nous affrontons le dénivelé de face. Olivier a laissé une belle longueur de corde et je le suis donc à bonne distance. La montée est âpre et assez fatigante à la longue. Vais-je arriver au bout ? Nous nous arrêtons peu et mangeons des barres de céréales à chaque coup de pompe. Puis, finalement, nous finissons par arriver au tout début de la crête sommitale qu’il va falloir chevaucher pour atteindre le sommet.
Nous faisons halte pour retirer nos crampons et nous nous engageons sur la crête puis laissons les sacs un peu plus loin. Nous les récupérerons au retour. Le panorama est extraordinaire puisque nous bénéficions à la fois de la vue sur le Mont-Blanc au loin ainsi que sur les lacs Jovet à l’opposé, but de notre prochaine descente. Nouvelle sensation au contact du rocher. Très agréable en fait, d’autant que la grimpe n’est pas bien difficile, pas plus ardu que du 3 (La cotation 1 correspond à un sentier escarpé tandis que la cotation 2 correspond à une progression utilisant les mains pour s’équilibrer. Les débutants en escalade progressent généralement dans le 4. Sans pratique régulière de l’escalade, il est difficile de franchir le 6a). Après un bel itinéraire aérien, nous voilà au faîte du Mont Tondu, une sorte de terrasse très confortable où nous nous arrêtons pour grignoter un brin avant de faire demi-tour pour récupérer nos sacs et entamer la descente.
C’est la première fois que j’éprouve une descente en haute montagne. Olivier m’indique la bonne marche à suivre crampons aux pieds, les pieds en canard face à la pente et en adoptant des mouvements amples afin d’éviter de déchirer ses guêtres, voire se casser la figure… ce qui peut s’avérer dangereux. La descente se passe plutôt bien excepté mes dessous de pied qui commencent à sérieusement me faire mal. Cela empirera une fois redescendu à hauteur des lacs Jovet et plus encore durant la longue marche forcée vers la vallée afin de ne pas rater le bus du retour. J’incriminerai les chaussures que m’avait prêtées Olivier alors que, en y repensant plus tard, ce furent bien plus les chaussettes qui m’auront blessées les pieds à tel point qu’arrivé à Paris, je boitais sérieusement et avançais à l’allure de la tortue !
Je ne me ferai pas surprendre une seconde fois ! Si bien qu’en prévision de la prochaine course prévue dans les Écrins l’année suivante, je passais plus de 2 heures au Vieux Campeur le printemps suivant à choisir ma paire de « grosses » (merci pour la patience d’Hélène au passage) afin de ne plus avoir mal aux pieds. Olivier me dira après cet achat que, de toute manière, ce n’est qu’une fois reparti en course que je saurai si le choix s’avérait judicieux ou pas. Toujours sur ses conseils, je dévalisais également le linéaire Decathlon de chaussettes de montagne anti, non pas crevaison mais ampoule, afin de repartir la fois suivante du… bon pied !