Pic central du Vaccivier par la crête de l’Orient – Pic ouest du Vaccivier (pointe Duhamel) – Sommet des Rouies / 10 septembre 2020
Le rendez-vous avait été pris de longue date avec Yann Romaneix, guide de haute montagne (https://bit.ly/3keTFyo) pour passer deux jours dans le confortable refuge du Pigeonnier (https://bit.ly/32pR8em) au cœur du Valgaudemar en Oisans. L’objectif du jour consistait à gravir l’éperon sud-est des Rouies, également dénommé Voie Rébuffat, le grand alpiniste ayant effectué la troisième ascension en compagnie de Joseph Bouisson en 1941. C’était une fois de plus sans compter sur la météo dégradée cette semaine-là.
A mon arrivée la veille, il se mit à pleuvoir en fin de journée et les prévisions du lendemain laissaient présager du mauvais temps, voire de l’orage, dans l’après-midi. Prévisions à prendre avec des pincettes sachant que la veille, Yann et sa cliente avaient essuyé de la pluie sur les coups de 11h alors qu’il ne devait flotter qu’en fin de journée. Or, l’éperon sud-est, une fois son premier tiers gravi, plus aucun échappatoire n’est possible et il faut donc sortir par le haut. Ayant déjà vécu une mésaventure orageuse sur une arête il y a quelques années (https://bit.ly/2Fojk8M), chat échaudé craint l’eau comme on dit ! Il fallait donc changer notre fusil d’épaule et Yann eut une idée de génie. La dernière journée devait être consacrée à remonter la crête de l’Orient menant au pic central du Vaccivier (https://bit.ly/3iqqrfq), un parcours facile où je passerai en tête en corde tendue à travers un itinéraire ne dépassant jamais le 2ème degré.
Yann proposa d’effectuer ce parcours dès le lendemain puis redescendre au col de Muande Bellone, remonter à la pointe Duhamel, descendre de nouveau vers le glacier des Rouies pour entamer la montée au sommet par sa voie normale. « A ma connaissance, cela n’a jamais encore été fait ! » s’est exclamé Olivier le gardien. Il faut dire que cette longue bavante ne manquait pas d’échappatoires au cas où je coule une bielle ou que le temps se dégrade. Un long et superbe séjour en altitude de pics en pics pour finir en beauté par l’ascension des Rouies, voila qui n’était pas pour me déplaire !
Nous sommes donc partis sur les coups de 5h le lendemain après un excellent repas la veille mitonné de main de maître par Olivier le gardien. La partie rando se termine lorsqu’il s’agit de récupérer le fil de l’arête par un cheminement ascendant plein est vers les 2870 m d’altitude. Rien de bien compliqué ni même l’attaque de la crête de l’Orient que nous allions parcourir sur environ la moitié de sa longueur. Yann est passé en tête puis ce fut à mon tour. Nul besoin de poser des protections tant la remontée est facile (quelques pas de 3 au niveau des ressauts).
Il suffit juste de penser à positionner la corde judicieusement sur les rochers pour assurer la cordée. Yann repassa en tête puis nous arrivâmes facilement au sommet du pic central du Vaccivier avant de plonger vers le col de Muande Bellone par un cheminement dans un terrain délité qui nous fit récupérer une crête facile après un pas un peu scabreux. Du col, l’on voit très bien le sommet de la pointe Duhamel qui semble fort loin. En montagne, les apparences sont souvent trompeuses ! L’ascension vers le pic ouest du Vaccivier est en fait très facile et ludique. Nous y arrivâmes rapidement et la suite de la bambée se déployait sous nos yeux. Tout d’abord le glacier des Rouies en contrebas, puis sa remontée en récupérant la trace bien visible, la rimaye ensuite et le sommet non visible. Arrivés au glacier, Yann me demanda si on continuait ou si j’étais trop fatigué. Comment s’arrêter en si bon chemin ? J’avais encore de l’énergie en réserve et avais trop envie de fouler ce glacier jusqu’au sommet ! Nous voilà donc partis encordés à distance, les ponts de neige pouvant être dangereux à cette époque de l’année.

La remontée vers la rimaye nous fit certainement passer au-dessus de gouffres. D’ailleurs, alors que nous cheminions, je vis Yann légèrement s’affaler avant de se redresser puis continuer. Arrivé à la même hauteur, mon bâton droit s’enfonça sans être stoppé par la neige. En le retirant, je vis que le trou qu’il avait formé n’avait pas de fond. A la place, du noir… plongeant vers je ne sais quel abyme ! Nous passâmes ainsi au-dessus de belles crevasses plus ou moins bien visibles.
La dernière partie de l’ascension, tout en neige à cette époque de l’année, nous fit remonter une pente d’environ 35° à 40° après avoir facilement franchi la rimaye. Le sommet est un magnifique belvédère sur les géants des environs, à commencer par le Sirac et ses hauteurs crénelées. Puis ce fut le retour sans encombres vers le douillet refuge du Pigeonnier où nous attendait Olivier qui nous concocta en début d’après-midi une merveilleuse omelette et des pâtes carbo !
Le lendemain, nous repartîmes à l’assaut du pic ouest du Vaccivier par son arête sud-sud-ouest dite du Gendarme Rouge (https://bit.ly/2HuJFCQ), une belle escalade sauvage dans le 4 comportant un passage en dalle olé-olé ! Yann eu la bonne idée d’identifier la descente la moins banzaï en évitant un énorme névé qui aurait pu poser problème car nous n’avions pas pris nos crampons. Nous sommes finalement redescendus par la voie de montée de la veille, à savoir une chouette désescalade de la crête de l’Orient, non sans avoir auparavant effectué une translation sous le sommet ouest et pris le temps de faire une halte sur les hauteurs pour apprécier la vue exceptionnelle du vallon du Gioberney au cœur du Valgaudemar.
