La traversée au long cours
La traversée au long cours

La traversée au long cours

19 avril 2022 / Traversée refuge du Carro – refuge des Evettes

En scrutant le parcours de la traversée Carro-Evettes sur la carte IGN, j’imaginais déjà la longue bambée que nous aurions à effectuer. Des passages de cols à plus de 3 000 m d’altitude, des redescentes puis des remontées dans un univers sauvage à souhait. J’étais loin du compte ! La première étape consista à parvenir au refuge du Carro situé à environ 2 760 m d’altitude non loin de la frontière italienne. Depuis Bonneval-sur-Arc, cela représente quelque 900 m de dénivelé et énormément de distance. Nous sommes arrivés en fin d’après-midi, après avoir bataillé contre une neige se transformant peu à peu en une immonde soupe, préludant ce que nous aurions à endurer le lendemain… Pas mal de skieurs en cette fin de journée au Carro, la plupart visant comme nous la traversée jusqu’au refuge des Evettes.

Moment convivial et repas excellentissime comme toujours en refuge de haute montagne ! A se demander même si ce n’est pas uniquement pour cette raison que nous pratiquons l’alpinisme !!! Tellement bien diné d’ailleurs que la phase d’endormissement fut complexe. En cause, un peu de tachycardie déclenchée par l’altitude. Cédrick Saintenoy, le gardien des lieux, nous avait fortement conseillé de nous réveiller une heure avant les skieurs de randonnées, sachant qu’étant en raquettes, nous progresserions moins vite qu’eux. Nous nous sommes donc levés aux alentours de 4 h pour un départ avant 5 h. Cédrick s’était également tiré du lit rien que pour nous alors qu’il aurait très bien pu roupiller jusqu’au lever des skieurs. Mais il a tenu à être présent et on le remercie chaleureusement !

La première partie de la bavante consiste à remonter des pentes de neige jusqu’à un premier col, celui des Pariotes situé à environ 3 000 m d’altitude. Nous y sommes arrivés aux alentours de 6 h tandis que les lueurs du jour apparaissaient. Cedrick nous avait expliqué que nous avions ensuite le choix entre deux itinéraires. Le plus court, plein Sud, nécessitait de remonter une pente à environ 40° sur plusieurs mètres. Le second, bien plus longuet mais moins difficile, consistait à éviter ce passage en suivant le tracé des skieurs qui bifurque vers le Sud-Ouest. Nous avons évidemment opté pour la première solution. Nous sommes tout d’abord tombés sur le glacier des Sources de l’Arc, enfin, ce qu’il en reste. Pas vraiment sexy et même en très mauvais état.

Glacier du Mulinet

Puis les pentes se sont effectivement redressées assez fortement dans une neige mollassonne en cette fin de nuit. Olivier a dû batailler pour former des marches dans un terrain que nous supposions instable. Nous avons fini peu à peu par nous extraire de cette situation pénible où la glissade était interdite, la faute à des barres rocheuses nous tendant les bras en contrebas. Nous sommes parvenus au col de Trièves. Au loin, les premiers skieurs débouchaient du col des Pariotes. Petite pause bienvenue avant certainement le clou du spectacle constitué par la traversée de la partie supérieure du glacier du Mulinet jusqu’au col du Grand Méan à 3 200 m d’altitude. Le cheminement est effectivement un enchantement, la vue exceptionnelle entre d’un côté les sommets formant frontière avec l’Italie, et de l’autre l’immensité du glacier étendant ses ailes en contrebas. A cette époque de l’année, il est encore recouvert de neige. Cependant, les principales crevasses sont identifiables. Mieux vaut être encordés dans ce type de passage.

L’arrivée au col du Grand Méan prouve là encore l’impact du réchauffement climatique. Olivier qui y était passé il y a quelques années avait peine à reconnaître les lieux. Le cheminement est scabreux jusqu’aux champs de neige du glacier du Grand Méan, lui aussi en phase de destruction lente et inexorable…

Glacier du Grand Méan

La progression dans cet univers inhospitalier jusqu’aux contreforts inférieurs du glacier, ses brisures et séracs de toute beauté, demeure malgré tout un émerveillement de chaque instant. Nous avons rejoint bien après le plan des Evettes en direction du refuge du même nom pour finalement l’abandonner sur notre droite, et poursuivre vers l’adorable hameau de l’Ecot au-dessus de Bonneval-sur-Arc. L’heure était déjà bien avancée dans l’après-midi, et le soleil avait tapé fort sur une neige de moyenne altitude. Nous avons perdu pas mal d’énergie dans une descente interminable, ralentis que nous étions en nous enfonçons à chaque pas malgré la portance de nos raquettes. Je n’avais jamais vécu telle expérience. Un véritable calvaire pouvant même se solder par une entorse. Vive le bitume nous sommes nous dits en parvenant à la route goudronnée menant à l’Ecot puis à Bonneval-sur-Arc. Le chalet CAF n’étant pas plein, nous avons profité de son toit, et de l’agréable resto du village servant de succulents diots. Ils sont venus élégamment conclure cette nouvelle aventure en duo.

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